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n chapiteau de cirque multicolore
est dressé sur le rond-point Schuman à Bruxelles, en septembre 2004. L'agence
néerlandaise OMA de Rem Koolhaas l'a édifié à la
demande de la Commission européenne. A l'intérieur, un vaste panorama montre
l'évolution chronologique de l'Europe «depuis la dérive des plaques
continentales à nos jours». Mis au défi de conduire une recherche en
«communication d'images» et de formuler des représentations européennes
communes, Rem Koolhaas et son équipe ont ici
retourné la commande en un dispositif critique. Pas neutre, le choix de la
tente de cirque et du panorama, un vieux modèle d'exposition du XIXe siècle. Loin de la vision unitaire recherchée dans
ce type de démonstration, apparaît ici le monde fragmenté d'une Europe en
«déficit d'image», vouée à rester sans iconographie unique. Le chapiteau est
démonté avant la date prévue. Petites villes. Sans doute, l'Europe communique
mieux à ses niveaux infranationaux qu'à celui de ses Etats. C'est même par un
effacement de l'Etat que se caractérisent les échanges, qui passent par les
villes et influencent leurs destinées économiques et culturelles. Ainsi
évoque-t-on aujourd'hui le retour des villes européennes, «on ne dit plus
que la ville européenne est obsolète, qu'elle relève de la nostalgie ou du
patrimoine, que l'efficacité économique est ailleurs». (1) L'urbanisme
européen reprend du poil de la bête, non seulement via ses capitales,
mais aussi par beaucoup de ses villes, petites et moyennes, comme Lérida, Tubingen, Birmingham (avec l'impact du grand magasin Selfridges, conçu par Future Systems)
ou grandes, comme Rotterdam, dont le centre ferroviaire a été confié à
l'urbaniste anglais Will Alsop. C'est aussi le cas de
certaines villes italiennes. Turin est un chantier à grande vitesse, qui
depuis l'approbation de son plan d'urbanisme spécial JO en 1995, tente de
modifier l'habituel binôme des villes (résidences-équipements)
pour des opérations associant public et privé, dans la quête d'une qualité
urbaine globale. A Milan, la réouverture toute récente de la Scala, par
l'architecte suisse Mario Botta, n'était que le prélude à une salve de
spéculations urbaines. En sus du projet de requalification de la foire de
Milan, confié aux architectes Daniel Libeskind et Zaha Hadid, à la conception du
nouveau siège de la région Lombardie, par Ieoh Ming
Pei et Henry Cobb, sir Norman Foster devrait
construire un futur quartier, Santa Giulia sur 120 hectares de friches industrielles. A
Milan, au total, dix-huit projets publics et privés d'architectes du monde
entier représentent une surface de 8 millions de m2. A Rome, où Zaha Hadid conçoit le nouveau
musée d'art moderne, la foire s'offre un nouveau quartier d'exposition près
de l'aéroport de Fiumicino : le Studio Valle Progettazioni, avec ses 22 pavillons et son centre de
direction. Banane bleue. Jusqu'en novembre, était exposé
au Pavillon de l'Arsenal, à Paris, le must des grands projets milanais.
D'aucuns relevaient alors «l'ambiance de promotion immobilière contemporaine»
qui y régnait. En effet, la ville lombarde est une composante essentielle de
la «banane bleue», cette conurbation (de forme banane), visible par
satellite, où courent les projets de création architecturaux, depuis Londres
jusqu'à l'Italie, via la Belgique, l'Allemagne, la Suisse, et
l'Autriche. Certains évoquent une
autre comète innovatrice en matière d'urbanisme citoyen, qui passerait par
Barcelone (modèle pour les maires européens), par le nouveau dynamisme
portugais, et filerait vers le nord du côté de la Norvège et d'Oslo, avec la
firme architecturale Snohetta. Il serait dommage
que Paris soit l'une des seules exceptions à ces ambitions urbaines.(1) Dossier Villes européennes, quels modèles ?,
revue Urbanisme, nov.-déc. 2004. |
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